Front commun hier, front commun aujourd’hui

Cette mobilisation des travailleurs et travailleuses du secteur public n’est pas sans faire écho aux manifestations monstres de 1972. Olivier Ducharme nous y plonge avec l’essai 1972, Répression et dépossession politique. D’une plume vivante, l’essayiste dresse un portrait inédit d’une année de colère et de combats, qui aurait pu être « révolutionnaire ».

Notre mémoire collective n’a généralement retenu que les épisodes les plus spectaculaires de 1972, comme l’importante grève du Front commun de la fonction publique et l’emprisonnement de ses chefs syndicaux. Mais l’auteur nous rappelle que la province assiste aussi à la montée des mouvements féministes, autochtones et environnementaux. Plusieurs événements témoignent d’un Québec en pleine ébullition : les femmes bravent l’interdiction d’entrer dans les tavernes, des grèves sauvages éclatent en mai, des villes sont entièrement occupées par les grévistes, les « cégeps parallèles » émergent, la censure s’installe à l’ONF, les Premières Nations se lèvent et résistent…

Mais malgré ses accents libérateurs, 1972 aura plutôt été frappée du sceau de la répression, si bien que, pour Ducharme, le phénomène de la dépossession politique se trouve au cœur de cette année mouvementée. L’essayiste montre jusqu’où l’État et ses institutions sont prêts à aller pour mater toute contestation, en imposant des limites à la liberté d’informer, de manifester, de créer et de penser à coups de lois spéciales, de mesures répressives et de censure. Se replonger dans cette période tumultueuse permet de renouer avec les mouvements sociaux audacieux et les bouleversements inouïs qui ont déjà animé le Québec, pour mieux comprendre et appréhender ceux qui se déroulent aujourd’hui sous nos yeux.